Energies renouvelables et protection du vivant
Notre société doit faire face à des changements importants parmi lesquels le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité (variété du vivant), diminution drastique des populations des espèces vivantes, …. Cet article explore quelques pistes pour que notre société puisse produire de manière soutenable de l’énergie sans que cela soit au détriment de la faune et la flore.
Sobriété avant tout
On ne le répétera jamais assez, l’énergie la plus propre est celle que nous ne consommons pas. Produire de l’énergie ne se fait pas sans impact : une centrale nucléaire génère plus du double de l’énergie qu’elle cède au réseau (cela peut génerer une hausse de jusqu’à 2°C dans le cours d’eau qui sert à la refroidir), les extractions minières et gazières ont par exemple leurs inconvénients pour la biodiversité…
Réduire ses consommations en énergie est plus que jamais nécessaire, mais aussi possible. Chacun peut le faire à son échelle isolation thermique des bâtiments, éco-gestes, mobilité douce et collective, alimentation, suivi de ses consommations, mutualisation, …
Une fois que ces ces actions ont été menées, il reste inévitablement une quantité d’énergie nécessaire pour satisfaire nos besoins et il est légitime de se demander comment la produire dans le respect des autres êtres vivants. Il est souhaitable de produire l’intégralité de notre consommation avec des énergies renouvelables, et plusieurs sources indiquent que c’est possible.
En particulier, le scénario Négawatt 2022 est couplé à Afterres 2050, un scénario de transition agricole, sylvicole et alimentaire. Développé par l’association Solagro, ce scénario propose, en cohérence avec la démarche NégaWatt, une approche systémique de l’utilisation des terres et de la biomasse visant un nouvel équilibre entre alimentation humaine, alimentation animale,

production de matériaux et d’énergie, et préservation des écosystèmes, de la biodiversité et des sols. L’agriculture selon Afterres2050 mobilise et généralise l’ensemble des meilleures pratiques et techniques disponibles. Le niveau global de production est maintenu par rapport au niveau actuel, mais les usages de ces productions sont profondément modifiés.
On peut aussi citer les scénarios de RTE et de l’Ademe, qui insistent sur la sobriété pour arriver à des trajectoires tenables.
L’énergie citoyenne
Les projets portés par des sociétés citoyennes ont un ancrage local fort : les personnes impliquées habitent à proximité des installations, elles ont naturellement un intérêt pour que les projets soient respectueux, notamment de la biodiversité qui les entoure. D’ailleurs, bon nombre des membres de collectifs citoyens sont aussi impliqués dans des associations en faveur de la nature. Les personnes qui ont pris en main le sujet de l’énergie sont souvent plus sensibles à la quantité d’énergie qu’ils consomment, à la disponibilité et la saisonnalité du renouvelable, à la nécessité de prendre soin des installations, …
Par ailleurs, dans ces collectifs, ce sont les citoyens qui ont le pouvoir décisionnel et choisissent comment et où l’installation sera posée. Certains collectifs font le choix de travailler en priorité sur des installations photovoltaïques en toiture par exemple.
Mais l’énergie citoyenne peut bien sûr concerner des projets d’envergure, construits en partenariat entre des développeurs et des citoyens. L’association « Energie Partagée », qui fédère l’énergie citoyenne au niveau national, propose un label pour distinguer les projets citoyens. L’une des 5 dimensions du label « Energie Partagée » est l’écologie, il y a trois critères requis pour la labellisation :

- La connaissance des enjeux environnementaux locaux est effective/réelle, si possible complète avec des retours d’expérience sur des installations similaires.
- Dans le cas d’un projet sans étude d’impact environnemental (EIE), la collectivité des actionnaires a conscience des impacts bruts du projet sur son environnement local et cherche à les atténuer voire les éviter, via des mesures concrètes.
- Les enjeux environnementaux identifiés ne doivent pas être rédhibitoires pour Énergie Partagée (critères de référence définis par filière).
Il y a donc une démarche engageante et spécifique à chaque énergie renouvelable menée en faveur de la biodiversité. En ce qui concerne le dernier point, Energie Partagée a défini une charte de bonnes pratiques pour chaque filière d’énergie renouvelable (charte photovoltaïque au sol / charte hydroélectricité / charte méthanisation)

Sur le parc photovoltaïque au sol du Génie à Ecrouves, pour favoriser la biodiversité, de nouveaux habitats ont été créés : un hibernaculum, une zone humide et des perchoirs ont été aménagés, et une haie de 600 mètres de long, composée d’essences favorables à la biodiversité, a également été plantée.
Les garde-fous réglementaires
La réglementation impose un certain nombre de mesures en faveur de la biodiversité. Les installations photovoltaïques dont la puissance est égale ou supérieure à 300 kWc sont soumises à l’obligation de réaliser une évaluation environnementale (sauf en toiture et ombrière de parking).
Pour l’éolien, les projets sont aussi soumis aux évaluation. La DREAL Grand Est met d’ailleurs à disposition des “zones favorables au développement de l’éolien”, qui permet d’identifier les sites sur lesquels il n’y a pas de contre-indication à une installation éolienne.
Qu’est ce qu’on peut faire ?
Au-delà des contraintes réglementaires, les porteurs de projets peuvent aussi choisir d’avoir des initiatives supplémentaires en faveur de la faune et la flore, notamment pour l’acceptabilité d’un projet ou simplement par conviction écologique. On peut par exemple faire un plan de bridage des éoliennes pour protéger les oiseaux et chauve-souris.
Il est aussi possible de mener des actions positives à la fois pour les ENR et la biodiversité. En milieu rural, la préservation ou la plantation de haies contribuent (entre autres) au maintien de la biodiversité et au confort du bétail, en même temps qu’elles constituent une ressource durable en biomasse. Cela permet d’alléger le poids que fait peser l’énergie biomasse sur la forêt.
De nombreuses ressources existent, on peut citer notamment le photoscope, l’éoloscope et le méthascope de la FNE ou le guide “Photovoltaïque, sol et biodiversité : enjeux et bonnes pratiques” de l’ADEME.
Le dialogue territorial, une nécessité
Échanger entre acteurs du territoire est fondamental. De la même manière, les associations en faveur de la biodiversité et des énergies renouvelables ne doivent pas s’opposer mais travailler en collaboration pour que le développement des énergies renouvelables soit à la hauteur des attentes sans se faire au détriment de la biodiversité.
Les trois associations qui portent l’animation du réseau GECLER (l’Agence Locale de l’Energie de Champagne-Ardenne, Alter Alsace Energies et Lorraine Energies Renouvelables) en on la conviction, il est possible de concilier production d’énergie renouvelable et préservation de la biodiversité locale, en construisant un projet transparent, concerté et ancré dans les réalités du terrain.

Ressources supplémentaires
WWF – Planification des énergies renouvelables : Où en est l’accélération ?
CLER – Énergies renouvelables et biodiversité : un dialogue s’instaure
Un article rédigé avec les contributions de :
Agence locale de l’énergie de Champagne Ardennes : Agathe His
Alter Alsace Energies : Angélique Gouillone, Audrey Petit, Dominique Klein, Julien Afonso
Et aussi :
Nicolas Delaporte
Luc Evrard